Commission nationale Enseignement Supérieur et Recherche du PCF

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Rapport introductif à la réunion de la commission enseignement supérieur et recherche du PCF tenue le 19.11.2011

Je ne vais pas vous faire découvrir Karl Marx mais Paul Krugman. Au moment même où France2 affichait l’autosatisfaction béate de Sarkozy appuyé sur Obama (sur, mais pas par), lors de ce qu’on a appelé le G2 à juste titre, Krugman écrivait dans le NY Times : « La réponse à spectre large cependant est que l’extrême concentration du revenu est incompatible avec la vraie démocratie. Quiconque peut-il nier sérieusement que notre système politique est distordu par l’influence du gros fric, et que la distorsion ne cesse de s’accentuer lorsque la richesse d’un petit nombre s’accroît sans discontinuer ? Quelques pontifes tentent d’écarter les préoccupations relatives à l’accroissement de l’inégalité comme quelque chose d’absurde. Mais la vérité est que c’est la nature même de notre société qui est en cause ».  Je reviendrais dans un instant sur une autre citation du même auteur. Mais auparavant, nous l’avions dit, nous l’avons répété et nous y sommes : la course à l’abîme est commencée ; elle entraîne dans sa chute des pays et des peuples entiers dans l’Union Européenne avec la Grèce, bientôt l’Italie, l’Espagne, le Portugal. La France n’échappe pas mais on va y revenir. Une très grave situation se met en place, la plus grave depuis la Seconde Guerre Mondiale. Cette course effrénée à la catastrophe n’est pas, comme on le sait, le produit des « péchés capitaux » que des choix politiques antérieurs peu regardants sur la dépense publique auraient accumulés, mais est due à l’appétit boulimique d’immenses masses de capitaux spéculatifs auxquels les choix politiques actuels non seulement se plient, mais qu’ils anticipent et façonnent. Même de gauche, le discours sur « c’est la finance qui dirige et contre elle on ne peut rien » doit être combattu car il exonère le pouvoir politique de ses responsabilités premières. Les dirigeants des principales puissances capitalistes de la planète ont décidé d’imposer aux peuples le fardeau écrasant de la guerre économique entre capitaux qu’ils ont eux-mêmes déclenchée, dont ils se sont réclamé, qu’ils ont organisée, de la spéculation sans frein, du fric pour le fric. Ce sont eux qui ont créé les fondements de la dévitalisation industrielle, créé les conditions de la dépendance alimentaire ; ce sont eux qui ont mis le potentiel universitaire et de recherche à genoux. Ce sont eux au premier chef qu’il faut mettre en accusation. Lorsque ce scénario effrayant tarde à se mettre en place pour des raisons variées comme en Grèce, on retrouve les accents de Munich. Nous devons le dire. Quoi que nous pensions de Papandréou et de ses palinodies, il est sans exemple depuis l’avènement d’Hitler que des chefs d’États dictent de façon aussi insolente à un pays qui n’est pas le leur, sa politique. Il y a pis : tout cela est contrôlé de près par les États-Unis d’Amérique, quel que soit celui ou celle qui les dirige. Le pays le plus endetté de la planète, qui a imposé à marche forcée à tous les autres l’alignement sur son modèle, celui qui prend des sanctions dès que se manifeste une velléité de sortir des clous balisés par l’Oncle Sam (on vient encore de le voir avec la grande victoire diplomatique de la Palestine qui fait son entrée à L’UNESCO) est celui qu’on accueille avec la plus grande révérence. L’État à qui l’on doit l’OMC, la banque Mondiale, le FMI, est celui dont on ne dispute pas la domination sur le monde. La crise du capitalisme, la crise écologique, la crise mondiale de l’approvisionnement, de l’eau, des matières premières prend sa source aux États-Unis d’Amérique et le premier État à qui devraient être imposées d’autres règles est aujourd’hui celui qui siffle la partition. Rien de tout ceci n’exonère les responsabilités propres des dirigeants de l’UE et spécialement du couple merkozyesque. Comme avant-guerre, avec le MEDEF en figure de proue, Sarkozy prend les devants, s’incline devant l’arrogance encore dissimulée mais très réelle de la Grande Allemagne, laquelle d’ailleurs connaît maintenant à son tour la flambée du chômage, la montée sans précédent après-guerre des inégalités sociales ; la misère a fait son apparition y compris à l’Ouest . Sa politique ne consiste pas à « rassurer » les marchés financiers mais à devancer leurs exigences sans limite et sans frein. Revenons à Paul Krugman : dans un autre éditorial, il fulmine contre les dirigeants européens qui n’ont toujours pas compris que l’un des problèmes était le statut de la BCE qui ne finance ni le crédit, ni les dettes souveraines, contrairement à la Banque Centrale Nord-Américaine qui a le pouvoir de le faire (mais ne le fait pas pour une part importante, là aussi par aveuglement de ses responsables et aussi par défaut d’impulsion politique) ; l’autre étant l’absence d’une fiscalité lourde sur les très hauts et hauts revenus. Paul Krugman est Keynésien, on ne va pas le lui reprocher ; dans ce qu’il dit, on reconnaît de larges aspects du programme du Front de Gauche. Krugman, pour Monsieur Attali, est visiblement un esprit attardé, un semi-marxiste inavoué. Convoqué dans le sillage du G2, celui-ci sur France2 déclare, sourire en coin de celui qui sait : « c’est la pire des solutions ». La bonne, évidemment, c’est d’une part la construction d’un super-gouvernement économique au niveau de l’UE piloté France-Allemagne, le fédéralisme européen, et d’autre part, vous l’avez deviné, une purge des dépenses publiques « comme la Grèce devra le faire et a commencé ». Ce personnage nanti d’une « Commission » est décidément hautement toxique ; insister sur la dissolution de la « Commission Attali » est sans aucun doute plus nécessaire encore aujourd’hui. Enfin, il est impossible de ne pas citer le même auteur dans son éditorial du 4/11/2011 intitulé : « Dette : Une autre voie existe : « Les souffrances que tant de nos compatriotes endurent n’ont pas lieu d’être ; ces temps de sacrifices incroyables et de durcissement des rapports sociaux procèdent d’un choix. Aujourd’hui, comme hier, rien n’oblige à opter pour ces choix là ». Tout ceci n’est pas rappelé pour nous évader du sujet dont nous avons à traiter : notre programme sur ESR, malgré des limites évidentes, a commencé d’attirer l’attention ; ni au Mans, ni à Toulouse, la réaction n’a été que le PCF était hors-jeu sur de telles questions.  Mais la conjoncture et ce que je viens de souligner entrent maintenant frontalement à l’encontre de ce que nous disons et peuvent recréer le sentiment qui avait largement du plomb dans l’aile : « rendez-vous à l’évidence, l’avenir c’est la continuité avec ce qui s’est déjà fait ; c’est la seule façon d’être accordés sur le monde tel qu’il va aujourd’hui ». Cette petite musique est maintenant explicite dans le discours de François Hollande. Soyons brutaux : ce qui était il y a un mois le scénario le plus probable ne l’est plus : la gauche peut une nouvelle fois perdre l’élection présidentielle. Si c’est le cas, n’ayons pas l’illusion de penser que, parce que le PCF aura tenu un autre discours, cette défaite ne le touchera qu’à la marge. Nous voulons le débat à gauche, le débat sur les mesures que devra prendre un gouvernement décidé à mener une politique de gauche ; le débat, pas les petites phrases assassines qui éloignent de l’essentiel. Une confrontation peut être rude à gauche. Elle est nécessaire avant l’échéance, mais c’est une confrontation dont l’enjeu est exigeant et une confrontation qui vise un unique objectif : réussir et ne pas recommencer des scénarios qui peuvent installer la droite et son extrême, pour longtemps au pouvoir. La Grèce et l’Espagne sont des avertissements suffisants. Et convaincre du fait qu’avec la défaite de Sarkozy et sa clique tout commence, n’est plus du tout un exercice de style mais un point de passage obligé. Encore un mot trop rapide sur une question qui n’est pas mince. F. Hollande déclare après le « sommet de Bruxelles » que le problème c’est… La Chine. Jusqu’à une date récente je pensais que notre réponse pouvait tenir en quelques mots ; mais depuis que l’Huma s’y met en écrivant que « la Chine développe des conditions extrêmement dures » pour participer au soi-disant plan de sauvetage de l’Euro, je vous avoue que j’ai vacillé. J’aurais voulu ici inclure un développement conséquent mais le temps me manque. Allons à l’essentiel : tous les observateurs ont noté que La Chine a été évincée du G 20 de Cannes ; le NYT qui n’est pas suspect dit que les problèmes de la Chine sont des questions essentiellement intérieures, que le relèvement exigé à cor et à cri de sa monnaie ne règlerait rien etc. etc. Allons plus loin et soyons clairs : les dirigeants chinois ont choisi le cynisme le plus brutal dans leur politique ; ils sont à bonne école. Ils ont décidé de jouer, pour ce qu’ils considèrent être les intérêts fondamentaux de la Chine, la carte de la mondialisation capitaliste ; le patrimoine grec est maintenant largement dominé par l’emprise du capitalisme chinois. Tout ceci est vrai.  Après des expériences multiples et malheureuses, la Chine a trouvé pour un temps le moyen de sortir d’un sous-développement endémique. Elle le fait dans les pires conditions et sans doute de la pire des façons ; mais qui l’a conduite à cette situation et à ces choix ? La Chine ne veut pas ressembler à Cuba qui d’ailleurs est maintenant à un tournant pour des raisons similaires. La Chine ne veut pas d’un blocus que les USA pourraient lui imposer ; elle prend de grands États capitalistes à revers ; elle joue mieux qu’eux leur propre partition ; tout ceci est vrai. Mais la Chine est demandeuse d’autres règles, au plan commercial, financier, monétaire, culturel, scientifique. C’est là, à mon sens – et on peut en débattre – ce qu’il faut voir d’abord : qu’elle trouve demain un partenaire qui joue avec elle un jeu différent et elle s’adaptera d’autant mieux que certains fondements d’un autre système sont encore présents chez elle, contrairement à la Russie. Disant cela ce n’est pas à l’emprise du PC Chinois, largement corrompu, détaché du peuple, que je songe, on l’aura compris. En vérité, le programme ESR du PCF qui doit s’enrichir encore notablement sur les aspects coopératifs dans le monde a la chance de pouvoir immédiatement trouver avec la Chine un répondant. Un gouvernement de gauche qui pratiquerait à son égard une politique d’hostilité serait condamné à l’alignement sur les États-Unis d’Amérique et ses dogmes. L’OMC en sortirait renforcée, comme le processus de Bologne, le traité de Lisbonne comme celui qui se prépare à le renforcer démesurément. Si c’est cela que vise le discours de F. Hollande, il est essentiel de croiser le fer avec lui à ce sujet. Encore un mot : tout ce qui précède, hors du développement sur la Chine, soulève une question de taille : devons-nous revoir à la baisse nos exigences et ce que nous avançons ? En règle générale, dans des situations déjà rencontrées, nous répondons « tout au contraire ; il faut renforcer encore ce qui peut et doit l’être ». Mais dans la situation que nous avons aujourd’hui nous voyons bien que cette réponse serait ridicule. C’est pourquoi le début de ce rapport introductif ; ne pas faire la clarté dès à présent sur les responsabilités, sur les impasses de deux discours, celui de la droite et celui d’une certaine gauche, c’est en effet nous exposer. Ne pensons pas que nos solutions pour l’ESR intéresseront si la voie n’est pas libre. Il faut une autre logique et des mesures effectives qui sortent notre pays et l’UE de la dictature des marchés financiers ; ne pas mettre l’accent là-dessus aujourd’hui c’est s’égarer. Où et comment ? Voici quelques pistes. Les initiatives d’origine syndicale suivront leur cours ; mais personne ne pense sérieusement s’en remettre à elles. Le site doit nous aider ; c’est une première contribution ; il incombe à chacune et chacun d’entre nous de le nourrir par des contributions individuelles et collectives. Un tract 4 pages national pourrait être envisagé : il devra contenir à la fois des aspects propositionnels (2 p.) et des aspects qui évoquent les problématiques précédentes (2 p.). Rien ne remplacera les foyers d’élaboration et de décision qu’il nous incombe de faire vivre sur les campus dans le cadre du FdG (dire cela ne signifie pas l’enfermement dans les organisations politiques qui le constituent), là où nous avons des forces, avec le souci permanent de mutualiser les expériences avec des échanges rapides et effectifs. Et j’y insiste à nouveau, ce sera ma conclusion, les mois qui viennent doivent faire monter l’exigence absolue, en cas de victoire de la gauche, d’une phase d’élaboration, de mise en discussion d’un état réel de ce qui aura été saccagé, démoli, amputé par la politique précédente et des mesures à prendre immédiatement pour réparer et rattraper ce qui peut l’être. Notre programme est détaillé à ce sujet sur la maîtrise d’œuvre come sur l’ampleur de ce qu’il y a à faire ; de partout monte un cri de nos Établissements, un cri de souffrance, un cri de colère et de désespoir. Nous ne pouvons pas faire grandir l’espoir si nous sommes en retrait sur la souffrance et la colère. Dans les circonstances actuelles, il ne suffit pas d’invoquer le mouvement populaire ou, en général «les luttes ». Le PCF doit donner le sens de cette bataille : les premiers mois d’un gouvernement situé à gauche de l’échiquier politique doivent être mis à profit pour des mesures tangibles immédiates et positives pour tous et tous doivent pouvoir y participer. C’est la condition pour poursuivre. Le succès d’une expérience de gauche, même dans des conditions peu idéales, reste possible. Il nous revient d’y travailler sans perdre un instant.

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